Etes-vous fait pour former à l’enseignement ?
Anne, quelle est votre expérience en enseignement ?
En fait, en 2005-2006, j’ai suivi une formation d’institutrice au Royaume-Uni. Avant cela, j’ai exercé quelques années comme professeur d’anglais dans un lycée parisien, mais sans aucune formation. Puis, je suis venue à Madrid où j’ai enseigné à des élèves du primaire dans une école Montessori.
Plus tard, j’ai passé le CELTA et commencé à travailler pour de grandes académies de langues, où j’enseignais principalement l’anglais général à de jeunes apprenants et des adultes, en plus de quelques cours d’anglais des affaires dans des entreprises.
Et qu’est-ce qui a d’abord suscité votre intérêt pour la profession de formateur en enseignement ?
Eh bien, cet intérêt s’est manifesté il y a cinq ans, lorsque mes employeurs m’ont proposé d’assister à une séance. À l’époque, je pensais cela impossible, car je croyais qu’il fallait être une enseignante « parfaite » pour devenir formatrice en enseignement. Ils m’ont en quelque sorte convaincue du contraire ; qu’il pouvait aussi s’agir d’un simple partage d’expériences. J’ai donc suivi une séance de formation vraiment convaincante et apprécié le défi.
Comment les nouveaux formateurs en enseignement s’y prennent-ils pour trouver des clients et mettre le pied à l’étrier ?
Tout est une question de contacts. J’ai commencé la formation dans mon académie, mais lorsque je suis devenue indépendante, j’ai compris très clairement que le carnet d’adresse était ce qui comptait le plus.
L’un de mes amis, en poste à Prague, m’a mise en contact avec la dirigeante d’une entreprise de formation en enseignement et j’ai commencé à travailler avec différents pays, établissements et clients dans le secteur privé, public, primaire, secondaire, CLIL, anglais – autant de domaines complètement différents.
Et peu à peu, les gens commencent à vous connaître et à apprendre votre nom et vous commencez à constituer votre portefeuille et votre liste de contacts. C’est ainsi que j’ai débuté. Tout est vraiment une question de contacts.
J’imagine que cela varie, mais pourriez-vous décrire une « journée type » sur votre lieu de travail ?
Cela dépend s’il s’agit d’un cours intensif, d’une session, d’un séminaire d’une journée ou d’une heure. Mais, prenons par exemple un cours intensif d’une journée : je commence par une tasse de café tôt le matin, vers 6h30, m’assurant ainsi que tout est prêt et opérationnel (bon fonctionnement des ordinateurs et de la connexion internet, photocopies prêtes à servir et disposition des tables et des chaises).
Puis, je prends un deuxième café en attendant les stagiaires, afin d’avoir l’air d’être complètement détendue, dégustant un bon café, au moment où ils entrent dans la salle. Ensuite, c’est quasiment sans arrêt, il faut se donner à fond jusqu’à la fin. Il faut constamment réagir sur-le-champ, parce que, quel que soit votre programme, il sera modifié par des imprévus de dernière minute.
La rémunération est-elle comparable à celle d’un professeur d’anglais ?
Pas vraiment. Là encore, cela varie selon que le client est une institution publique ou privée. Toutefois, le salaire est plus élevé que celui d’un enseignant EFL.
Quelles sont les exigences minimales pour devenir formateur ? Est-ce un secteur réglementé ?
Si vous cherchez à devenir formateur en enseignement au sein d’une institution, alors oui, c’est très réglementé. Ainsi, on vous demandera généralement au minimum une licence et, de plus en plus, une maîtrise.
Le DELTA, le diplôme de la Trinité et, bien entendu, le CELTA avant cela. Mais si, comme moi, vous travaillez pour votre propre compte, alors c’est plutôt votre expérience, votre portefeuille et la façon dont vous vous présentez aux clients qui feront la différence.
À votre avis, à qui ce travail convient-il ?
Je pense qu’il convient aux gens qui aiment encore enseigner. De nombreuses personnes déclarent : « que le travail de formateur est fait pour ceux qui en ont assez de l’enseignement. » Je ne pense pas du tout que cela soit vrai.
En fait, je pense que pour être un bon formateur, vous devez encore exercer le métier d’enseignant et être passionné par l’enseignement. Parce que si vous n’enseignez pas, vos stagiaires s’aperçoivent très clairement que vous n’êtes plus dans le circuit depuis bien longtemps et n’en comprenez plus les rouages.
C’est pourquoi je pense que ce métier est fait pour des passionnés de l’enseignement, conscients des difficultés de la profession, ayant suffisamment l’âme d’un « thérapeute » pour se sentir capables d’aider les enseignants à aller mieux et à mieux apprécier leur travail.
Tout comme n’importe quel enseignant, un formateur doit être un animateur : il aide, guide et instaure la confiance. Je pense que le métier de formateur en enseignement conviendrait formidablement à presque toutes les personnes passionnées par l’enseignement et qui se sont toujours intéressées aux aspects psychologiques de l’éducation.
Qu’auriez-vous souhaité savoir avant de commencer ?
Je pense qu’il est important de savoir que vous serez parfois plongé dans le grand bain sans aide ni soutien. Cela ressemble assez au métier d’acteur. Le public vous juge pendant vos 10 ou 15 premières minutes sur scène, de la même manière que les étudiants évaluent leur professeur en début d’année scolaire. Comme vous le savez, nous devons tous jouer la comédie en début d’année !
Cependant, le rôle de formateur est un peu plus difficile, car votre public est habituellement composé d’enseignants, dont certains sont plus expérimentés que vous.
Certains d’entre eux, voire la plupart, sont « obligés » de participer à la formation ; soit parce qu’elle leur permettra d’obtenir des points ou que leur responsable leur a conseillé de suivre de nombreuses heures de formation. Donc je suppose que c’est quelque chose qu’il est bon de savoir avant de commencer. Vous devez être assez sûr de vous et vraiment croire en votre capacité à aider les enseignants.
Un dernier conseil ?
Je pense que mes principaux conseils se résumeraient à cultiver vos contacts et à donner autant que vous recevez. Pour ma part, mon plus grand soutien est venu des personnes avec lesquelles j’ai commencé et vécu les moments les plus difficiles au début de ma carrière d’enseignante dans différents pays et régions. Toutes les personnes rencontrées à cette période sont devenues très importantes pour moi.
Autre point important, assurez-vous de donner autant que vous recevez. C’est essentiellement une question de partage. Les gens ne sont pas là pour voler des idées, mais juste pour essayer de faciliter et d’améliorer davantage l’éducation de nos étudiants et de nos stagiaires.